Margaux Laurens Neel

Margaux Laurens-Neel est une artiste franco-britannique, née en 1997 à Deauville. Elle est diplômée des Beaux-Arts de Paris en 2021, après un parcours ponctué d’un séjour à l’académie des Beaux-arts de Vienne, d’un autre à Berlin, et d’un passage par l’atelier de Joann Sfar et dans celui d’Éric Poitevin.
 

 Le travail de Margaux se concentre sur l’intime, abordant des thèmes tels que les échanges non verbaux, les rapports de force, le désir et l’introspection. Margaux utilise principalement la peinture à l’huile, le pastel gras et le crayon de couleur pour leur générosité et leur capacité à capturer la profondeur et les vibrations des couleurs et des matières. Elle travaille aussi avec la céramique, notamment la faïence, qu’elle trouve sensuelle et intuitive.

Nous montrerons ses travaux à l’occasion de l’exposition Ça va bien se passer. 

INTERVIEW : Margaux Lauren Neels

Comment illustres-tu l’intime dans ton travail ? Pourquoi est-ce pour toi un sujet pertinent à explorer ?

L’intime est essentiel en ce qu’il nous touche et nous décrit dans notre vérité la plus crue, la plus brute et la plus sinueuse. Mon travail ne touche que de l’intime pour autant qu’il traite d’échanges non verbaux entre les êtres, de rapports de forces, de sexualité, de désir et dévoration, d’introspection et de contemplation mélancolique.

Y a-t-il un événement personnel ou politique spécifique qui a inspiré l’une de tes œuvres ?  

C’est difficile à dire. La puberté et la verbalisation, la prise de conscience des tumultes de mon être comme de celle de mon désir, de mes pulsions, de ma frustration et de la volonté sont des évènements clefs. Conjoint à mon éveil poétique, philosophique et littéraire quant aux textes mythologiques, théologiques et romantiques ? ( Métamorphoses d’Ovide, Lucrèce, Beaudelaire, Chateaubrillant, Lautréamont, Bataille, Rebell…).

Que penses-tu du thème de notre expo, comment penses-tu qu’il se traduit dans ton travail ?

Les notions d’intime et d’adelphité raisonnent très fortement en moi comme ils participent à souligner ce qui est au final essentiel dans les rapports humains, défaits des rapports de force entre les sexes. 

Peux-tu nous décrire ton processus de création ? Comment abordes-tu le développement d’une nouvelle œuvre sur des thèmes aussi personnels et politiques ?

Grosso modo : un sentiment, un sentiment lent et de longue durée qui me bouffe de l’intérieur, l’avènement d’une image, la récolte de symboles et d’iconographie, la naissance d’un dessin, la réalisation d’une peinture ou d’une sculpture, la verbalisation de ce sentiment devenu narration.

Quel message espères-tu transmettre à travers tes œuvres ? Y a-t-il une réaction ou une réflexion particulière que tu espères susciter chez les spectateurs ?

Je souhaite faire passer par mes œuvres une notion de générosité et d’identification libre, proposer des corps, des chairs, des corpulences qui éveillent chez l’autre une notion de « moi aussi », une sensibilité, une caresse, un réconfort. Témoigner de forme de désirs, de formes de pulsions, de violences et de vécus qui raisonne chez l’autre et amène à la réflexion. J’invite aussi à la contemplation et au repos. Comme à la jouissance et au choc. Créer des images de pouvoir, faire détonateur.

 

As-tu eu des retours ou des réactions mémorables de la part du public concernant tes œuvres ?

Un jour, un de mes pénis en résine à été léché par une visiteuse tant le pulsionnel et la gourmandise étaient incarnées. Une autre fois, une peinture de pénis à été déchiquetée sous les ongles d’une autre artiste qui a qualifié mon travail de « bombe » et ainsi déclenché en elle ce qu’elle avait de plus impulsif et violent. Plus récemment des peintures ont été censurées pour bienséance, ce qui m’a permis de constater que les questions liées aux corps et aux sexualités sont encore tout à fait taboues, lorsqu’elles sont peintes avec honnêteté.

Comment tes expériences personnelles en tant que femme ou personne de minorité de genre influencent-elles ton travail artistique ?

Mon travail est entièrement guidé par le fait d’être une femme, cisgenre, bisexuelle, hypersensible, avec une libido très encombrante. C’est par l’expérience et l’expérience « des flammes » que j’ai pu conscientiser ces enjeux et développer une parole et un engagement. Sublimer les expériences et mes traumas en une chose noble et utilitaire.

Comment vois-tu le rôle de l’art dans cette lutte ?

L’art est peut-être la plus belle forme de langage pour se sortir du chaos et informer, éduquer, rassurer et faire rêver.

Comment penses-tu que les thèmes de l’intime et du politique évolueront dans ton art à l’avenir ?

Ils seront toujours l’essence même de mon travail comme ils sont l’essence même de mon être.

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